La coproscopie équine est un examen parasitologique et cytologique non invasif, économique et essentiel pour le diagnostic des troubles digestifs chez les chevaux. L'analyse des fèces permet d'évaluer la santé du système digestif et d'identifier diverses pathologies, contribuant ainsi à un traitement rapide et efficace.

Cette analyse repose sur l’étude de plusieurs paramètres : l'examen macroscopique (aspect visuel des fèces), l'examen microscopique (identification des éléments microscopiques), la recherche de parasites et la détermination du pH fécal. L'interprétation des résultats nécessite une expertise vétérinaire, mais ce guide fournit des informations clés pour une meilleure compréhension.

Analyse macroscopique des fèces

L'observation directe des fèces fournit des informations cruciales sur l'état digestif du cheval. L'examen visuel porte sur plusieurs critères importants : la consistance, la couleur, l’odeur, et la présence éventuelle de sang, de mucus ou de corps étrangers.

Aspect général des fèces équines

Normalement, les fèces équines sont formées en bouses bien définies, légèrement humides mais non liquides. Leur couleur est généralement brun foncé, témoignant d'une bonne digestion. L'odeur est fécale, modérée et caractéristique. Des variations sont possibles selon la ration alimentaire : un régime riche en foin produit des fèces plus foncées et plus sèches, tandis qu'une ration riche en concentrés peut donner des fèces plus molles.

  • Consistance : Des fèces liquides (diarrhée) indiquent une inflammation intestinale, une infection parasitaire (comme une strongylose), une intoxication ou un trouble métabolique. Une consistance dure (constipation) peut être le signe d'une déshydratation, d'une obstruction intestinale (colique), ou d'un manque de fibres dans l'alimentation. En moyenne, un cheval adulte produit entre 8 et 12 kg de fèces par jour.
  • Couleur : Une couleur noire peut suggérer un saignement digestif supérieur (ulcère gastrique). Une couleur claire, jaunâtre ou verdâtre peut indiquer un trouble hépato-biliaire ou une mauvaise digestion des aliments. Une coloration rouge vif indique la présence de sang frais.
  • Odeur : Une odeur fétide et nauséabonde peut indiquer une fermentation excessive, une infection bactérienne ou une putréfaction. Une absence quasi totale d'odeur peut être liée à une perturbation de la flore intestinale.

Interprétation des anomalies macroscopiques

La présence de sang (hématochézie), de mucus ou de matières non digérées est un signe important à prendre en considération. Le sang frais témoigne d'une hémorragie récente, tandis que le sang digéré (couleur noire) indique un saignement plus ancien. Le mucus en excès suggère une inflammation de la muqueuse intestinale (colite). Des matières non digérées (fibres végétales) peuvent refléter une mauvaise mastication, une insuffisance de la sécrétion des enzymes digestives ou une atteinte intestinale.

Exemple clinique: cas d'une colique

Un cheval présentant une colique aiguë peut présenter des fèces liquides, voire muqueuses, de couleur foncée voire noire (sang digéré), avec une odeur fétide et nauséabonde. Ceci, combiné à des signes cliniques (douleur abdominale, sudation, tachycardie), nécessite une intervention vétérinaire d'urgence. La durée de transit intestinal normal chez le cheval est de 24 à 72 heures.

Analyse microscopique des fèces

L'examen microscopique des fèces, réalisé après préparation d'un frottis, permet d’identifier des éléments invisibles à l'œil nu : œufs de parasites, bactéries, champignons, cellules inflammatoires (leucocytes, érythrocytes) et fibres végétales non digérées. Un échantillon frais et représentatif (environ 50g) est indispensable pour la fiabilité des résultats.

Examen direct au microscope

L'examen direct permet d’identifier une variété d'éléments : œufs de parasites (strongles, ascaris, trichocéphales, etc.), cellules inflammatoires (signes d’inflammation intestinale), bactéries (potentiellement pathogènes), champignons (mycoses) et fibres végétales non digérées (mauvaise digestion). La numération des œufs de parasites permet d’évaluer le degré d’infestation et la gravité de la parasitose. Un comptage de 200 œufs de strongles par gramme de fèces est généralement considéré comme significatif.

Identification des parasites et interprétation

Plusieurs parasites peuvent infecter le tube digestif des chevaux. Les strongles (nématodes) sont parmi les plus fréquents, causant des dommages à la muqueuse intestinale. Les ascaris (grands nématodes) peuvent provoquer des obstructions intestinales. Les trichocéphales (parasites qui se fixent au gros intestin) induisent des inflammations. L’identification des œufs permet de déterminer le type de parasite et d’adapter le traitement antiparasitaire.

  • Strongles : Œufs de forme ronde ou ovale, généralement brun clair. Leur nombre (compté par gramme de fèces) permet d’évaluer l’intensité de l’infestation. Le nombre de strongles adultes dans l'intestin peut atteindre plusieurs centaines de milliers.
  • Ascaris : Œufs de grande taille (environ 70-80 µm), généralement bruns et à coque épaisse.
  • Trichocéphales : Œufs de forme asymétrique, avec un opercule à un pôle (environ 50 µm).

Analyse de la flore bactérienne

Dans certains cas, une analyse plus poussée de la flore bactérienne (ex: par culture) est nécessaire pour identifier des bactéries pathogènes impliquées dans des diarrhées, coliques ou autres troubles digestifs. Une dysbiose intestinale (déséquilibre de la flore bactérienne) peut aussi être mise en évidence.

Recherche de cellules inflammatoires

La présence de leucocytes (globules blancs) dans les fèces indique une réaction inflammatoire au niveau du tube digestif. La présence d'érythrocytes (globules rouges) suggère une hémorragie. Leur nombre est corrélé à la sévérité de l’inflammation ou de l’hémorragie. Un nombre élevé de leucocytes (>50 par champ microscopique) indique une inflammation importante.

Evaluation de la digestibilité des fibres

L'examen microscopique permet d'évaluer le degré de digestion des fibres végétales. Une quantité importante de fibres non digérées indique une mauvaise digestion, potentiellement due à une mastication insuffisante, une carence enzymatique, une mauvaise qualité de l'alimentation ou une atteinte fonctionnelle de l'appareil digestif. La présence de nombreux résidus alimentaires indique une mauvaise digestion.

Autres examens complémentaires

D'autres analyses complètent les informations obtenues par la coproscopie pour un diagnostic plus précis.

Recherche de sang occulte

Ce test immuno-chimique permet de détecter la présence de sang dans les fèces, même en petites quantités, indiquant un saignement digestif souvent occulté à l'examen macroscopique.

Mesure du ph fécal

La mesure du pH fécal permet d’évaluer l'équilibre de la flore intestinale. Un pH anormal (trop acide ou trop basique) peut indiquer une dysbiose intestinale, une fermentation excessive ou une infection. Le pH normal est compris entre 7 et 8.

Culture bactérienne

En cas de suspicion d’infection bactérienne, une culture fécale permet d’identifier le germe responsable et de déterminer sa sensibilité aux antibiotiques, guidant ainsi le choix du traitement antibiotique le plus approprié.

Examens complémentaires

La coproscopie doit être interprétée en association avec d'autres examens : analyses sanguines (biochimie, hématologie), échographie abdominale, endoscopie digestive (fibroscopie). Ces examens permettent une évaluation plus complète de l'état de santé du cheval.

Interprétation globale des résultats et conclusions

L’interprétation des résultats d'une coproscopie équine nécessite une analyse globale et une expertise vétérinaire. L’aspect macroscopique, les résultats microscopiques et les examens complémentaires doivent être considérés conjointement pour poser un diagnostic. L'anamnèse (historique du cheval, symptômes, alimentation, etc.) est indispensable pour une interprétation pertinente.

Par exemple, la présence d'un grand nombre d’œufs de strongles, associée à une diarrhée et à des leucocytes dans les fèces, indique une strongylose avec inflammation intestinale. Une constipation avec absence de fibres végétales digérées et un faible apport hydrique suggèrent un régime alimentaire pauvre en fibres et une déshydratation. Dans un cas de suspicion de parasitisme intestinal, il est important de procéder à un traitement antiparasitaire approprié, qui peut être adapté en fonction de l'identification des parasites. La fréquence des vermifugations est également un point important à considérer pour la prévention des parasitoses. Le suivi régulier de la coproscopie permettra d'évaluer l'efficacité du traitement.

Il est crucial de rappeler que des résultats de coproscopie normaux ne garantissent pas l’absence totale de pathologie digestive. Inversement, des résultats anormaux ne permettent pas toujours de poser un diagnostic définitif. Une consultation vétérinaire est indispensable pour l'interprétation des résultats, le diagnostic différentiel et la mise en place d'un plan de traitement adapté au cheval.

La prévention des troubles digestifs passe par une alimentation équilibrée et riche en fibres, un accès permanent à de l'eau fraîche et propre, une bonne hygiène de l'environnement et une gestion du stress. Une surveillance régulière des fèces et une consultation rapide du vétérinaire en cas d'anomalies permettent une prise en charge précoce et efficace des problèmes digestifs.