Imaginez un cheval sauvage, crinière au vent, bravant les bourrasques hivernales. Le cheval domestique, bien qu’éloigné de ces conditions extrêmes, hérite des mêmes mécanismes d’adaptation face au froid. Cependant, nos pratiques d’élevage et les exigences liées à l’activité sportive du cheval nécessitent une attention particulière à son alimentation durant la saison froide.
Ce guide vous orientera à travers les besoins nutritionnels spécifiques du cheval en hiver et vous proposera des conseils pratiques pour ajuster son alimentation, assurant ainsi sa santé et son bien-être. L’hiver n’est pas seulement une affaire de couvertures plus épaisses, mais surtout d’une nutrition repensée pour soutenir l’organisme de votre équidé face aux défis du froid. Une gestion nutritionnelle appropriée permettra de prévenir de nombreux problèmes de santé et de maintenir un niveau de performance optimal si votre cheval poursuit son activité durant cette période. Découvrez comment adapter l’alimentation de votre cheval en hiver pour optimiser sa santé et ses performances.
Comprendre les besoins nutritionnels accrus du cheval en hiver
En hiver, le cheval doit déployer plus d’énergie pour maintenir sa température corporelle. Comprendre les facteurs qui influencent cette dépense énergétique et les besoins nutritionnels spécifiques est primordial pour ajuster son régime alimentaire et garantir sa santé. Une approche ciblée de la nutrition hivernale permet d’éviter les carences et les problèmes de santé.
Dépense énergétique accrue
La thermogenèse, processus par lequel le cheval génère de la chaleur, s’intensifie considérablement en hiver. Pour compenser cette dépense, l’apport calorique doit être augmenté. Plusieurs facteurs impactent cette dépense, notamment la température ambiante, l’humidité, le vent et la disponibilité d’un abri convenable. Un cheval exposé aux intempéries sans protection augmentera significativement ses besoins énergétiques, parfois jusqu’à 25% par rapport à ses besoins estivaux 1 . L’activité physique est également un facteur déterminant; un cheval travaillant en hiver nécessitera un apport calorique encore plus important. Un ajustement précis de l’apport calorique est crucial pour maintenir un poids optimal et prévenir une perte de masse musculaire.
Importance accrue des fibres (foin)
Le foin est l’aliment de base du cheval, et son rôle prend une dimension encore plus critique en hiver. La digestion des fibres, via la fermentation dans le gros intestin, génère de la chaleur, contribuant au maintien de la température corporelle 2 . Le foin constitue donc une source de chaleur « interne » plus efficace que les céréales. Il existe différents types de foin, chacun avec une valeur nutritive distincte. Un foin de graminées sera généralement moins riche en énergie qu’un foin de légumineuses tel que la luzerne. Par ailleurs, le temps de mastication nécessaire pour consommer du foin a un effet positif sur le bien-être psychologique du cheval, réduisant le risque d’ennui et de comportements anormaux. Enfin, une quantité suffisante de fourrage favorise une bonne hydratation grâce à la stimulation de la salivation.
Besoins en eau
La déshydratation est un risque majeur en hiver, souvent sous-estimé. L’eau gelée et la diminution de la sensation de soif induite par le froid peuvent réduire la consommation hydrique. La déshydratation peut avoir des conséquences graves sur la santé du cheval, incluant des coliques d’impaction, dues à un ralentissement du transit intestinal. Pour stimuler la consommation d’eau, plusieurs solutions peuvent être adoptées : offrir de l’eau tiède, ajouter des saveurs naturelles comme du jus de pomme, ou utiliser des abreuvoirs chauffants. Il est primordial de surveiller la quantité d’eau bue quotidiennement, en particulier chez les chevaux âgés ou ceux ayant des antécédents de coliques.
Besoins spécifiques en vitamines et minéraux
L’hiver peut provoquer des carences en certaines vitamines et minéraux essentiels au maintien de la santé du cheval. Le foin hivernal est souvent moins riche en vitamine E, un antioxydant crucial pour l’immunité et la protection cellulaire 3 . Le sélénium, qui travaille en synergie avec la vitamine E, joue un rôle fondamental dans la fonction musculaire et immunitaire. Le cuivre et le zinc sont également nécessaires pour la fonction immunitaire et la santé des sabots. Une supplémentation minérale et vitaminique adaptée, basée sur une analyse de fourrage et les besoins individuels du cheval, est fortement conseillée. Cette supplémentation devrait être mise en place dès l’automne pour préparer l’organisme du cheval à l’hiver.
| Nutriment | Rôle en hiver | Sources alimentaires |
|---|---|---|
| Calories | Maintien de la température corporelle, énergie pour l’activité | Foin, céréales (avoine, orge), huile végétale (lin, colza) |
| Fibres | Production de chaleur (fermentation), santé digestive | Foin de graminées ou de légumineuses, pulpe de betterave |
| Vitamine E | Soutien de l’immunité, protection antioxydante | Compléments alimentaires (ex : Cavalor VitE Supreme), huile de germe de blé |
| Sélénium | Fonction musculaire et immunitaire optimale | Compléments minéraux (ex : Audevard E-Selenio), levure de bière |
| Eau | Hydratation, transit intestinal régulier (prévention des coliques) | Eau propre et accessible, aliments humides (mash) |
Adapter l’alimentation du cheval en hiver : recommandations pratiques
Ajuster le régime de votre cheval en hiver est essentiel pour préserver sa santé et son bien-être. L’accent doit être mis sur le fourrage, les concentrés et les suppléments nécessaires pour combler tout besoin nutritionnel spécifique. Une approche personnalisée garantira une nutrition optimale pour votre équidé.
Fourrage : la base de l’alimentation hivernale
Le fourrage demeure le pilier de la nutrition hivernale du cheval. La quantité de foin conseillée est d’au moins 1,5% du poids vif en matière sèche, idéalement 2 à 2,5% pour les chevaux sensibles au froid ou ceux soumis à un travail régulier. La qualité du foin est primordiale; une analyse est recommandée pour déterminer sa valeur nutritionnelle. En cas de foin de qualité médiocre, des alternatives comme l’enrubanné (avec des précautions strictes pour limiter le risque de botulisme) ou les granulés de foin peuvent être envisagées. La gestion du foin est également cruciale : distribution régulière en plusieurs petits repas, accès permanent (si possible) et prévention du gaspillage. Une distribution fractionnée favorise une production de chaleur continue et une meilleure digestion.
- Assurez-vous d’avoir des réserves de foin suffisantes pour l’intégralité de la saison hivernale.
- Si possible, offrez un accès continu au fourrage.
- Privilégiez les filets à foin à petites mailles afin de ralentir la consommation et limiter le gaspillage.
Concentrés : un complément adapté aux besoins individuels
Les concentrés, tels que les granulés, les floconnés ou les aliments enrichis en fibres, peuvent compléter l’apport énergétique du foin. La quantité de concentrés doit être ajustée en fonction du niveau d’activité, de la race, de l’âge et de l’état corporel du cheval. Un suivi régulier de la note d’état corporel (échelle de Henneke) est essentiel pour adapter la ration et prévenir le surpoids ou la maigreur. Certains aliments, comme l’huile végétale, le son de blé (avec modération) ou les graines de lin (préalablement cuites pour neutraliser l’acide cyanhydrique), sont reconnus pour leur effet « réchauffant » et peuvent être bénéfiques durant l’hiver.
L’huile végétale, par exemple, constitue une source d’énergie concentrée qui soutient le maintien de la température corporelle. Le son de blé, riche en fibres, stimule la fermentation dans le gros intestin et contribue également à la thermogenèse. Les graines de lin, riches en acides gras oméga-3, présentent des bienfaits pour la peau, le pelage et le système immunitaire.
Supplémentation : combler les carences potentielles
Une cure de vitamines et minéraux spécifiques pour l’hiver peut s’avérer nécessaire pour pallier les éventuelles carences liées à la qualité du foin et à la diminution de l’ensoleillement. Les probiotiques et les prébiotiques peuvent soutenir la flore intestinale, améliorer la digestion des fibres et stimuler l’immunité. Les huiles de lin ou de colza sont d’excellentes sources d’oméga-3, bénéfiques pour la peau, le poil et la fonction immunitaire. Un « mash » hivernal, mélange tiède de son, pulpe de betterave, huile et graines de lin (cuites), est une option intéressante pour hydrater et réchauffer le cheval.
Lors de l’utilisation de compléments alimentaires, il est important de se renseigner sur les produits et leurs composition. Des marques comme « NAF » , « Cavalor » ou « Audevard » proposent des gammes spécifiques pour les chevaux, adaptées à leurs besoins nutritionnels 4 .
- Consultez votre vétérinaire ou un nutritionniste équin pour identifier les besoins spécifiques de votre cheval et choisir les compléments adaptés.
- Privilégiez les compléments de qualité, certifiés et conformes aux normes en vigueur.
- Respectez scrupuleusement les doses prescrites.
Gestion de l’eau : un impératif souvent négligé
L’approvisionnement en eau est un aspect critique de l’alimentation hivernale du cheval, et trop souvent omis. L’utilisation d’abreuvoirs chauffants ou l’isolation des abreuvoirs existants permet de prévenir le gel. La distribution d’eau tiède plusieurs fois par jour est également une pratique bénéfique. Après un effort physique soutenu, l’ajout d’électrolytes à l’eau peut compenser les pertes dues à la sudation. Mettre en place un « challenge de l’eau », avec des objectifs ludiques visant à encourager les propriétaires à suivre la consommation hydrique de leurs chevaux (en utilisant des applications mobiles), peut s’avérer une approche motivante et efficace.
Un cheval consomme en moyenne entre 19 et 38 litres d’eau par jour, mais cette quantité peut significativement varier en fonction de son niveau d’activité et des conditions météorologiques. Une déshydratation, même légère, peut avoir un impact négatif sur sa performance et sa santé générale.
Alimentation des chevaux âgés en hiver
Les chevaux âgés sont confrontés à des problématiques spécifiques en hiver, telles que des difficultés de mastication et une diminution de l’absorption des nutriments. Une alimentation adaptée est donc indispensable. Le foin de bonne qualité haché ou en granulés est plus aisé à mâcher. Des aliments spécialement formulés pour les chevaux seniors, enrichis en glucosamine et chondroïtine pour le soutien articulaire, peuvent également se révéler bénéfiques. Une surveillance attentive de la note d’état corporel et une adaptation régulière de la ration sont primordiales.
| Problème | Solution nutritionnelle |
|---|---|
| Difficultés de mastication | Foin haché, granulés de foin réhydratés, aliments en purée |
| Diminution de l’absorption des nutriments | Aliments hautement digestibles, supplémentation ciblée en vitamines et minéraux |
| Raideur articulaire | Compléments alimentaires (glucosamine, chondroïtine), alimentation anti-inflammatoire (oméga-3) |
| Perte de poids | Augmentation progressive de l’apport calorique, aliments riches en matières grasses de qualité (huile végétale) |
Alimentation des chevaux de compétition en hiver
Les chevaux de compétition, même en période hivernale, ont des besoins nutritionnels spécifiques pour maintenir leur masse musculaire, leur énergie et leur capacité de récupération. L’apport en protéines de haute qualité est essentiel pour la réparation et la croissance musculaire. Il faut privilégier des sources de protéines digestibles comme le soja ou les graines de lin. La quantité de concentrés doit être ajustée en fonction de l’intensité de l’entraînement, avec une attention particulière aux glucides complexes pour une énergie durable. L’ajout d’électrolytes après l’exercice est indispensable pour compenser les pertes dues à la transpiration. Il est conseillé de travailler en étroite collaboration avec un nutritionniste équin pour élaborer un plan nutritionnel personnalisé et optimiser les performances du cheval.
Gestion des chevaux en surpoids en hiver
La gestion des chevaux en surpoids en hiver exige une approche rigoureuse pour prévenir les risques de fourbure et autres problèmes métaboliques. Il est crucial de limiter l’accès au pâturage, surtout si l’herbe est riche en sucres. Il faut privilégier un foin pauvre en calories et riche en fibres, distribué en quantités contrôlées. L’utilisation de filets à foin à petites mailles peut ralentir la consommation et prolonger le temps d’alimentation, favorisant ainsi la satiété. Il est important d’encourager l’exercice régulier, même léger, pour stimuler le métabolisme et brûler les graisses. Une surveillance attentive de la note d’état corporel est essentielle pour ajuster la ration et suivre l’évolution du poids.
Surveillance et adaptation continue
La nutrition hivernale du cheval requiert une observation attentive et une adaptation continue. Le suivi de la note d’état corporel, l’observation du comportement et de la santé, et l’adaptation aux conditions météorologiques sont fondamentaux pour assurer le bien-être du cheval. Une approche proactive permet d’anticiper les problèmes et d’optimiser la santé du cheval.
Importance du suivi de l’état corporel (body condition score – BCS)
L’évaluation de la note d’état corporel à l’aide de l’échelle de Henneke est un outil précieux pour moduler le régime alimentaire du cheval en hiver. Cette échelle, allant de 1 (maigre) à 9 (obèse), permet d’évaluer la quantité de tissu adipeux du cheval. Une évaluation régulière, idéalement une fois par mois, permet de détecter rapidement les changements et d’ajuster la ration en conséquence. Un cheval en sous-poids nécessitera un apport calorique accru, tandis qu’un cheval en surpoids devra voir sa ration réduite. La note d’état corporel idéale se situe généralement entre 4 et 6.
- Familiarisez-vous avec l’évaluation précise du BCS de votre cheval.
- Prenez des clichés réguliers pour suivre l’évolution de son état corporel.
- Consultez votre vétérinaire ou un nutritionniste équin si vous avez des doutes quant à l’état corporel de votre cheval.
Observation attentive du comportement et de la santé
L’observation minutieuse du comportement et de la santé du cheval est primordiale pour repérer rapidement les problèmes et adapter l’alimentation. Les signes de froid, tels que les frissons et les tremblements, doivent alerter sur un manque d’énergie ou un défaut de protection contre les intempéries. Les signes de déshydratation, tels que la peau sèche et les crottins secs, indiquent un besoin accru d’hydratation. Les symptômes de coliques, incluant l’agitation et les douleurs abdominales, nécessitent une intervention vétérinaire immédiate.
Adaptation aux conditions climatiques changeantes
Les conditions climatiques en hiver peuvent être extrêmement variables, et il est essentiel d’adapter la nutrition du cheval en conséquence. La prévision des baisses de température et des tempêtes permet d’anticiper en augmentant l’apport calorique et en garantissant un abri adéquat. Constituer des réserves de foin suffisantes est également impératif pour affronter les périodes de mauvais temps. Adapter la ration en fonction des fluctuations météorologiques est une garantie de bien-être pour le cheval.
- Consultez régulièrement les prévisions météorologiques.
- Préparez un stock de foin suffisant pour anticiper les périodes de mauvais temps.
- Adaptez la ration en fonction des conditions climatiques et du niveau d’activité du cheval.
Kit de survie nutritionnelle pour l’hiver
Préparer un kit de survie nutritionnelle est une précaution judicieuse pour faire face aux imprévus de l’hiver. Ce kit devrait comporter des électrolytes pour compenser les pertes hydriques, du mash pour hydrater et réchauffer le cheval, un thermomètre pour contrôler sa température, ainsi qu’une source d’énergie concentrée, comme de l’huile végétale. Avoir ces éléments à portée de main permet de réagir rapidement et d’assurer le confort du cheval.
Une nutrition hivernale adaptée : un gage de bien-être
Adapter la nutrition de son cheval en hiver ne se limite pas à une simple augmentation de la ration. Il s’agit d’une démarche globale qui prend en compte les impératifs spécifiques du cheval, les conditions climatiques et son niveau d’activité. Le fourrage de qualité doit constituer le fondement de l’alimentation, l’eau doit être accessible en permanence, et la ration doit être adaptée en fonction des besoins individuels de l’animal. Le suivi de l’état corporel et l’adaptation continue sont des éléments clés pour assurer son bien-être.
N’hésitez pas à solliciter l’avis d’un vétérinaire ou d’un nutritionniste équin pour une évaluation personnalisée des besoins de votre cheval. En adaptant son alimentation et son environnement, l’hiver peut se révéler une saison agréable pour votre compagnon, faite de complicité et de partage. La mise en place d’une gestion proactive de la nutrition hivernale assure non seulement la santé du cheval, mais contribue également à renforcer votre lien et à préserver sa performance, si vous choisissez de maintenir son activité durant cette période.
Références
- National Research Council. (2007). Nutrient Requirements of Horses (6th Revised Edition). Washington, DC: The National Academies Press.
- Cymbaluk, R. F. (1990). Influence of feeding on thermoregulation in horses. Journal of Animal Science, 68(Suppl. 1), 327.
- Valentine, B. A., et al. « Vitamin E status of horses in northern California. » Journal of Veterinary Internal Medicine 6.6 (1992): 319-326.
- Informations disponibles sur les sites officiels des marques NAF, Cavalor et Audevard.